« Les jeunes docteurs ne doivent pas avoir peur de prendre leur place dans l’entreprise » affirme André Tordeux, PDG de Genoscreen, PME de Biotech

Itw andré Tordeux

« Les docteurs sont bien formés, persévérants et très sérieux. Mais ils sont parfois figés et peinent à sortir d’un chemin tout tracé » remarque André Tordeux, PDG de Genoscreen, PME de Biotech. Ce chef d'entreprise nous livre dans cet entretien la place qu'il estime que les docteurs sont en mesure d'occuper au sein de l'entreprise.
 

L’attitude décrite par ce chef d’entreprise, semble résulter davantage d’un formatage dû à leur parcours de thèse qu’à un manque de capacités : « Un travail acharné à produire des résultats pendant leur thèse ne prépare pas les doctorants à avoir du recul sur leur parcours et à anticiper les étapes suivantes de leur carrière. Le travail doctoral développe de grandes qualités, comme la rigueur ou la persévérance, mais en inhibe d’autres. Par manque de confiance en eux ils n’osent peut-être pas saisir les opportunités qui s’offrent à eux » regrette le PDG.
 
Ils se restreignent d’eux-mêmes au champ de la R&D, se fermant ainsi des portes : « Ils s’intéressent trop exclusivement à la Recherche. A leurs yeux, le secteur de la R&D est suffisamment prestigieux et attractif. Ils sont trop peu nombreux à s’intéresser aux autres fonctions de l’entreprise. A titre d’exemple, le développement commercial ou stratégique de l’entreprise attire peu les jeunes docteurs des disciplines scientifiques » regrette-t-il.

Une attitude qu’André Tordeux déplore d’autant plus qu’il déclare : « qu’il a toujours été attiré par ce qu’il ne savait pas faire ». Directeur de Recherche en sciences de gestion, André Tordeux a créé Genoscreen en 2001. Genoscreen compte actuellement 30 salariés. Cette biotech lilloise développe et réalise des prestations et des solutions innovantes en génomique, à destination des laboratoires de recherche académiques et privés.

« Les laboratoires académiques sont aussi bien des clients que des partenaires » déclare-t-il. Des collaborations sont développées avec de nombreux laboratoires : « Des directeurs de recherche séniors interviennent, ponctuellement, dans l’entreprise, en qualité de consultants. Ils nous enrichissent de leurs conseils et des relations qu’ils entretiennent avec des équipes de recherche, souvent prestigieuses. »

Les PME sont un vivier d’emplois dans le secteur des biotechnologies. Elles représentent 37 % des effectifs du secteur selon l’Étude sur les besoins en compétences dans les Biotechnologies Santé, LEEM, octobre 2011. «Nous ne ressentons pas de pénurie de personnels qualifiés en sciences et en technologies, à notre niveau » déclare le chef d’entreprise. Cette situation trouve en partie son explication dans le fait que la région Nord Pas-de-Calais ne propose que 4 % des emplois dans les biotech, loin derrière les 38 % affichés pour la région Ile de France et les 26,8 % de la région Rhône-Alpes (toujours selon l’étude du LEEM).

Les PME en biotechnologies connaissent quelques difficultés de recrutement de profils qualifiés. « Malheureusement, des entreprises comme la nôtre doivent aussi faire appel à d’autres qualifications, notamment technico-commerciales qui, elles, sont très difficile à trouver. C’est d’ailleurs un facteur limitant de notre croissance. Cette pénurie, au niveau des qualifications mixtes (Doctorat + Master commercial), est aggravée par le fait que les sociétés de plus grande taille sont très actives pour attirer chez elles, les technico commerciaux une fois qu’ils ont fait leurs premiers pas dans des biotech » regrette André Tordeux.

On l’aura donc compris, un biologiste qui souhaite travailler chez Genoscreen doit être proactif et ouvert à d’autres types de métiers. « Chez nous un docteur doit être autonome et pouvoir intervenir sur différents programmes. En tant que responsable de projet, il doit savoir monter des projets, rechercher des financements, répondre à des appels d’offres, conduire des travaux, susciter des collaborations, mais aussi publier. Un docteur doit aussi savoir exploiter son "réseau" car s’il vient d’un environnement scientifique qui intéresse l’entreprise et il doit être à même d’en tirer parti » résume-t-il.

« Chez Genoscreen, le cœur de l’innovation de l’entreprise est la R&D. Nous n’avons pas d’autre choix que d’être innovants. C’est là qu’est notre facteur clé de succès principal. C’est la raison pour laquelle, chaque année, nous investissons plus du quart de notre chiffre d’affaires en R & D. Il est, par conséquent, normal que nos chercheurs et nos ingénieurs soient considérés comme des ressources clés. Ces ressources sont d’autant plus profitables à l’entreprise, qu’elles contribuent à son rayonnement international, au gré des publications (plus de 10, en moyenne, par an) et des communications qui sont faites dans des congrès internationaux » précise-t-il.

« Ces présentations publiques contribuent à la visibilité et à la promotion de Genoscreen et conduisent, naturellement, au développement de nos activités. Cette tâche incombe à nos docteurs en biologie moléculaire qui sont d’excellents vecteurs pour notre développement commercial » assure André Tordeux.

La renommée de l’entreprise a dépassé les frontières de l’hexagone. « Le Kit de traçage du Bacille de Koch (tuberculose) de Genoscreen est le seul actuellement disponible au niveau mondial. D’importantes innovations sont en cours de lancement, notamment en microbiologie, avec le lancement de solutions optimisées d’analyses de communautés microbiennes et celui d’un kit de dépistage des résistances aux antibiotiques qui exploite la puissance des nouvelles technologies de séquençage » se réjouit le chef d’entreprise.

« Depuis 2001, Genoscreen a vécu plusieurs révolutions technologiques. L’entreprise a toujours su s’adapter et rebondir, avant tout, grâce à ses salariés et, en particulier, grâce à ses docteurs » conclut-il.

 
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