Je t?aime, moi non plus

Marc ISABELLE, Ph.D. Economiste Agence de l?Innovation Industrielle

Voici quelques résultats d’une étude sur la propriété intellectuelle, la circulation et les échanges de connaissances entre des laboratoires publics de recherche et des entreprises.

L’enquête a été lancée en 2004 par l’Institut pour le Management de la Recherche et de l’Innovation (IMRI) de l’université de Paris-Dauphine auprès de 1 800 labos environ, dans trois domaines : la chimie, les sciences et technologies de l’information et de la communication et les sciences de la vie. Son objectif : caractériser les pratiques de collaboration, du point de vue des partenaires publics, afin de permettre à chacun d’identifier les clefs d’une stratégie partenariale qui valorise la production scientifique et technologique sans compromettre la tradition de science ouverte.

146 responsables de laboratoires ont répondu au questionnaire. Ces labos, à 52% en sciences de la vie, à 37% en chimie et à 11% en STIC, représentant plus de 6 800 personnels de recherche annonçaient 875 partenariats noués. 90% des labos déclaraient entretenir des relations partenariales avec des entreprises. Avec combien d’entreprises ? Le nombre moyen de partenaires déclaré par labo était de 6,9 et 15% des labos disaient en avoir plus de dix. Mais ces labos ne sont pas représentatifs de la population d’ensemble : ils sont très actifs en matière de partenariats industriels.

Recherche appliquée versus recherche fondamentale ?
Les relations avec les entreprises prennent des formes multiples et sont très structurantes pour les labos, notamment parce qu’elles leur offrent un levier important de développement via le recrutement de jeunes chercheurs. Elles doivent toutefois être gérées avec précaution afin d’éviter des conséquences négatives pour les activités scientifiques. L’enquête révèle que si ces relations conduisent les labos à augmenter leurs activités de recherche appliquée néanmoins, cela ne nuit pas vraiment à la recherche fondamentale. Ce que les entreprises imposent aux labos, ce sont des restrictions en matière de diffusion et de partage des connaissances, qui se manifestent jusqu’à l’intérieur même des équipes.

En termes de propriété intellectuelle et de management des actifs intangibles apportés et retirés des partenariats, l’enquête indique une grande variété des pratiques qui reflète probablement la diversité des situations rencontrées. La propriété des résultats est majoritairement partagée, mais la plupart des labos expérimentent aussi la propriété exclusive. De plus, les contrats de confidentialité apparaissent tout aussi importants que les brevets pour protéger les résultats partenariaux et les labos protègent leur patrimoine en faisant valoir un état des connaissances qu’ils possédaient avant le contrat et en sécurisant la propriété de ces résultats antérieurs. Enfin, si les relations amènent des conflits assez fréquents entre partenaires (15% des labos disent en avoir connu un récemment), les trois quarts sont rapidement résolus…