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Catehrine Gayda & Bérénice Kimpe - Relations internationales
Jean-Michel Romann est Directeur des Services Mobilité Groupe chez EDF. Ce service compte 25 collaborateurs et gère les différentes étapes de la mobilité internationale pour environ 650 salariés expatriés. Mr Romann a accepté de nous recevoir afin de nous parler des enjeux de la mobilité internationale pour l’ensemble des acteurs de ce projet : le salarié, sa famille et l’entreprise.Catherine Gayda/Bérénice Kimpe : Mr Romann, bonjour. La notion de mobilité internationale peut être interprétée de manière très large et prendre donc différentes formes : euro-commuting, expatriation, missions ponctuelles à l’étranger... Pour un groupe comme EDF, comment se définit la mobilité internationale ?
Jean-Michel Romann : Concrètement, il s’agit d’exercer une activité professionnelle dans un autre pays que le sien. On a ainsi des flux allant du siège vers les filiales et inversement. L’autre caractéristique de cette mobilité est sa limitation dans le temps, puisqu’elle est forcément liée à une mission spécifique, à des besoins spécifiques du groupe. Au-delà de la simple définition, il ne faut pas perdre de vue les contextes dans lesquels elle peut avoir lieu : dans le cadre d’un projet, comme par exemple le lancement d’un nouveau chantier à l’étranger, ou dans le cadre d’un parcours professionnel, pour le développement de compétences ciblées.
Par conséquent, l’identification des candidats à l’expatriation se fait de deux manières. Dans le cadre d’un projet, c’est EDF qui va à la recherche de candidats. En fonction du calendrier d’exécution du projet et surtout de la présence des ressources humaines locales, nous allons identifier les besoins en termes de personnel puis établir la fiche de poste qui sera ensuite diffusée via notre intranet et relayée par les directions des entités concernées. De manière symétrique, c’est aussi au salarié de prendre l’initiative et d’exprimer son envie de mobilité internationale au moment de l’entretien annuel. C’est le moment où l’on parle bien sûr de l’année écoulée mais surtout des objectifs de l’année à venir et des perspectives professionnelles du salarié. Une fois cette volonté exprimée, le salarié entre dans un vivier de candidats potentiels à l’expatriation : il ne partira que si son profil correspond à des besoins validés par les filiales et s’il est « expatriable ».
CG/BK : Ce terme d’ «expatriabilité» est intéressant. Cela veut dire que tout le monde n’est pas apte à partir. Comment vérifiez-vous cette aptitude ?
JMR : Il ne faut pas oublier que l’expatriation est un réel investissement pour une entreprise. Le risque d’échec n’est pas nul, nous devons faire en sorte de choisir le bon candidat pour réduire autant que possible ce risque. On va donc vérifier ses compétences et la cohérence du projet de mobilité avec l’ensemble des facteurs personnels, tels que le projet professionnel, l’environnement familial...
Au-delà des compétences professionnelles, techniques, nous évaluons aussi la capacité à s’adapter à un environnement radicalement différent du milieu d’origine, à s’adapter à une autre culture nationale, voir une autre culture business. Pour cela nous disposons d’un certain nombre d’outils de diagnostic et même d’autodiagnostic. Parmi les aptitudes évaluées, figurent la manière de s’exprimer et surtout la capacité à adapter sa propre communication en fonction de ses interlocuteurs, l’ouverture d’esprit, la capacité à modifier son comportement si nécessaire...
J’ajoute que ces différentes aptitudes sont évaluées par rapport au pays de destination, car un profil adapté pour les Etats-Unis par exemple, ne le sera pas forcément pour la Chine. La mobilité internationale est sans doute le seul domaine des RH où l’on doit se préoccuper aussi de la situation personnelle et familiale du salarié. Nous devons en effet réunir le plus grand nombre de facteurs de succès et de sécurité d’une expatriation pour le salarié et pour ses accompagnants (conjoint et/ou enfants) et prévenons les difficultés liées, dans certains pays de destination, à la situation matrimoniale ou à l’orientation sexuelle.
Nous sensibilisons beaucoup nos salariés à l’importance du partage du projet au niveau des couples et des familles car un projet de mobilité est aussi un choix familial. On amène notamment le conjoint à se poser les bonnes questions par rapport à ce départ, surtout s’il est dans une logique de « conjoint-suiveur » : quel impact sur sa propre carrière ? Quelle plus-value pour son propre projet professionnel ? Comment imagine-t-il cette mise entre parenthèses de sa vie professionnelle ? On a pu constater que beaucoup en profitaient pour opérer une réorientation professionnelle.
CG/BK : Peut-on dire que le caractère « expatriable » du salarié est immuable, comme inscrit dans les gènes ?
JMR : Absolument pas. On se base sur des éléments à un instant t. Le salarié va connaître des évolutions professionnelles et personnelles qui vont modifier son aptitude à partir. On peut être « expatriable » à un moment et ne plus l’être à un autre moment, et inversement. De la même manière, on peut être « expatriable » dans certains pays et pas dans d’autres.
CG/BK : Une fois que le salarié est sélectionné pour partir, comment l’accompagnez-vous pour préparer sa mobilité ?
JMR: Il y a deux aspects dans l’accompagnement. D’une part, les aspects logistiques et financiers : voyage de reconnaissance dans le pays avec le conjoint, prime de mobilité, maintien du niveau de vie, égalisation fiscale sous le principe de «no gain, no loss», relocation incluant la recherche d’un logement, la scolarité des enfants, le transfert, le voyage pour rentrer dans le pays d’origine.
Ensuite, nous préparons le salarié et son conjoint aux spécificités du pays dans lequel ils partent : renforcement linguistique, formation d’un à deux jours à l’interculturel, aspects santé et sécurité. Sur ce dernier point, nous impliquons la Direction de la sécurité de l’entreprise : pour certains pays, le logement et le véhicule doivent répondre à des normes bien précises, comme par exemple le blindage du véhicule ou un système de tracking permettant de localiser en temps réel les expatriés.
CG/BK : En évoquant la question de la sécurité, vous venez de rappeler l’importance de réfléchir à ses propres critères de mobilité, notamment géographiques. La mobilité internationale n’est pas que géographique, elle implique aussi une flexibilité psychologique, émotionnelle. Pouvez-vous nous parler des formations interculturelles et en quoi elles sont nécessaires ?
JMR : Nous faisons travailler les futurs expatriés sur trois axes principaux : les mécanismes de la culture, la dédramatisation du choc culturel, les différents cycles de la mobilité et les états émotionnels qui y sont liés. Bien entendu, nous les faisons réagir sur la culture du pays d’accueil et les stéréotypes qu’ils peuvent avoir.
Mais la plus grande partie du travail consiste en une réflexion personnelle sur ses propres cadres de référence, tant culturels que professionnels, sur ses valeurs, sur sa manière d’être et de se comporter... Car on ne peut modifier son comportement que si on est conscient de sa propre manière de fonctionner et des raisons qui sous-tendent nos réactions. Et travailler avec des personnes d’une autre culture nécessite de s’adapter. La question ensuite est de se demander jusqu’à quel point on est prêt à s’adapter : c’est pourquoi certaines personnes sont « expatriables » dans des pays et pas dans d’autres. Nous mettons également en garde nos salariés contre les jugements de valeur qu’ils pourraient avoir face à l’autre culture : ce n’est pas mieux, ce n’est pas moins bien, c’est juste différent. Attention aussi à la position potentiellement arrogante de l’expatrié qui, parce qu’il sera envoyé à l’étranger pour apporter une expérience, des compétences, se sentira en position de force : le meilleur moyen de se mettre à dos l’équipe d’accueil !
Les formations interculturelles ne sont pas des solutions magiques pour réussir son intégration mais elles permettent d’anticiper les difficultés, notamment émotionnelles, auxquelles seront confrontés les futurs expatriés.
CG/BK : Cette notion d’acculturation se retrouve aussi lors de la phase retour, puisqu’on se sent comme un étranger chez soi (cf article). Il semble que cette phase soit difficile à gérer. Qu’en pensez-vous ?
JMR : Le retour d’expatriation est une phase délicate, et c’est normal. D’ailleurs, la notion même de retour est trompeuse, car elle donne l’impression que l’on va revenir à l’endroit que l’on a quitté quelques années auparavant. Or, on a soi-même beaucoup changé, tout comme le contexte dont on s’est temporairement éloigné. On ne peut donc jamais vraiment revenir à la case départ. C’est sur ce malentendu que reposent les difficultés.
C’est la raison pour laquelle je n’aime pas parler de retour mais plutôt de nouveau départ en fin d’expatriation. Les expatriés reviennent certes dans la direction d’EDF qu’ils ont quittée mais surtout avec de nouveaux acquis, si l’expérience de mobilité a été réussie. La difficulté réside à deux niveaux : lors de leur réintégration dans un environnement qu’ils considèrent désormais comme banal car non international par exemple et lors de la valorisation de cette expérience à l’étranger. C’est sur ce dernier point que j’aimerais insister.
On me demande souvent si une expérience de mobilité internationale a un réel impact sur la carrière. Honnêtement, il est difficile de mesurer cet impact sur le plan du développement professionnel et personnel, même s’il est réel et très riche. Ce qui est sûr, en revanche, c’est qu’avoir réussi sa mobilité apporte, aux yeux des managers, une crédibilité quant à la capacité du salarié à effectuer un changement professionnel. En effet, il a osé tenter l’aventure et a su s’adapter à un nouveau contexte : s’il l’a fait une fois, il peut le refaire et c’est cette projection, à partir de l’expérience passée, qui va rassurer le manager sur la capacité du salarié à gérer son changement professionnel.
Certains peuvent être frustrés car ils ne voient pas l’ «utilité» directe de cette expérience à l’international. Or, et c’est quelque chose qu’ils ont tendance à oublier, la mobilité est un moment privilégié pendant lequel on approfondit la connaissance de soi, la compréhension de ses rapports aux autres. Ensuite, une gestion de carrière ne se fait pas au coup par coup et doit s’envisager sur le long terme. Le salarié doit donc réfléchir en termes de dynamique de carrière et c’est ce que cette expérience internationale lui permet : mise en perspective de ce qui a été accompli jusqu’à présent, prise de recul par rapport aux compétences développées, mise en valeur de certains aspects du parcours...
Si on compare le projet professionnel à un jeu de Lego, cette expérience à l’étranger est représentée par une brique d’une couleur et d’une forme différente qui va se clipser sur ce qui a été construit et va bouleverser le reste de la construction.
CG/BK : Nous venons d’évoquer la valorisation des compétences pour le salarié. Existe-t-elle au niveau collectif, au niveau de l’entreprise ?
JMR : Oui, bien sûr. Une entreprise, qui a vocation à se développer à l’international, a tout intérêt à valoriser cette expérience. C’est un capital non négligeable pour le lancement ou le développement de nouveaux projets internationaux.
Chez EDF, nous reconstruisons le réseau des anciens expatriés pour justement pouvoir les solliciter de nouveau au moment d’un projet dans un pays donné. Ces personnes, par leur expertise et leur connaissance du pays, vont ainsi contribuer à l’émergence d’idées, l’apport de conseils et de contacts utiles pour la réussite du projet... A travers la construction de ce réseau, nous réalisons simultanément une cartographie des ressources et des compétences internationales, ce qui permet aussi de revaloriser la personne anciennement expatriée et confirmer la plus-value à moyen et long terme de cette expérience internationale.
CG/BK : Nous arrivons à la fin de notre entretien. Un dernier mot ou conseil avant de nous quitter ?
JMR : Si vous envisagez de partir à l’étranger, posez-vous le plus de questions possible et notez-les. Ne partez pas sans avoir obtenu de réponses ou de conseils : partez en toute connaissance de cause ! Bien préparée, une mobilité internationale est toujours un très beau projet.
CG/BK : Mr Romann, merci beaucoup pour cet entretien et bonne continuation dans vos nouvelles fonctions de DRH chez EDF R&D !
Jean-Michel Romann : Concrètement, il s’agit d’exercer une activité professionnelle dans un autre pays que le sien. On a ainsi des flux allant du siège vers les filiales et inversement. L’autre caractéristique de cette mobilité est sa limitation dans le temps, puisqu’elle est forcément liée à une mission spécifique, à des besoins spécifiques du groupe. Au-delà de la simple définition, il ne faut pas perdre de vue les contextes dans lesquels elle peut avoir lieu : dans le cadre d’un projet, comme par exemple le lancement d’un nouveau chantier à l’étranger, ou dans le cadre d’un parcours professionnel, pour le développement de compétences ciblées.
Par conséquent, l’identification des candidats à l’expatriation se fait de deux manières. Dans le cadre d’un projet, c’est EDF qui va à la recherche de candidats. En fonction du calendrier d’exécution du projet et surtout de la présence des ressources humaines locales, nous allons identifier les besoins en termes de personnel puis établir la fiche de poste qui sera ensuite diffusée via notre intranet et relayée par les directions des entités concernées. De manière symétrique, c’est aussi au salarié de prendre l’initiative et d’exprimer son envie de mobilité internationale au moment de l’entretien annuel. C’est le moment où l’on parle bien sûr de l’année écoulée mais surtout des objectifs de l’année à venir et des perspectives professionnelles du salarié. Une fois cette volonté exprimée, le salarié entre dans un vivier de candidats potentiels à l’expatriation : il ne partira que si son profil correspond à des besoins validés par les filiales et s’il est « expatriable ».
CG/BK : Ce terme d’ «expatriabilité» est intéressant. Cela veut dire que tout le monde n’est pas apte à partir. Comment vérifiez-vous cette aptitude ?
JMR : Il ne faut pas oublier que l’expatriation est un réel investissement pour une entreprise. Le risque d’échec n’est pas nul, nous devons faire en sorte de choisir le bon candidat pour réduire autant que possible ce risque. On va donc vérifier ses compétences et la cohérence du projet de mobilité avec l’ensemble des facteurs personnels, tels que le projet professionnel, l’environnement familial...
Au-delà des compétences professionnelles, techniques, nous évaluons aussi la capacité à s’adapter à un environnement radicalement différent du milieu d’origine, à s’adapter à une autre culture nationale, voir une autre culture business. Pour cela nous disposons d’un certain nombre d’outils de diagnostic et même d’autodiagnostic. Parmi les aptitudes évaluées, figurent la manière de s’exprimer et surtout la capacité à adapter sa propre communication en fonction de ses interlocuteurs, l’ouverture d’esprit, la capacité à modifier son comportement si nécessaire...
J’ajoute que ces différentes aptitudes sont évaluées par rapport au pays de destination, car un profil adapté pour les Etats-Unis par exemple, ne le sera pas forcément pour la Chine. La mobilité internationale est sans doute le seul domaine des RH où l’on doit se préoccuper aussi de la situation personnelle et familiale du salarié. Nous devons en effet réunir le plus grand nombre de facteurs de succès et de sécurité d’une expatriation pour le salarié et pour ses accompagnants (conjoint et/ou enfants) et prévenons les difficultés liées, dans certains pays de destination, à la situation matrimoniale ou à l’orientation sexuelle.
Nous sensibilisons beaucoup nos salariés à l’importance du partage du projet au niveau des couples et des familles car un projet de mobilité est aussi un choix familial. On amène notamment le conjoint à se poser les bonnes questions par rapport à ce départ, surtout s’il est dans une logique de « conjoint-suiveur » : quel impact sur sa propre carrière ? Quelle plus-value pour son propre projet professionnel ? Comment imagine-t-il cette mise entre parenthèses de sa vie professionnelle ? On a pu constater que beaucoup en profitaient pour opérer une réorientation professionnelle.
CG/BK : Peut-on dire que le caractère « expatriable » du salarié est immuable, comme inscrit dans les gènes ?
JMR : Absolument pas. On se base sur des éléments à un instant t. Le salarié va connaître des évolutions professionnelles et personnelles qui vont modifier son aptitude à partir. On peut être « expatriable » à un moment et ne plus l’être à un autre moment, et inversement. De la même manière, on peut être « expatriable » dans certains pays et pas dans d’autres.
CG/BK : Une fois que le salarié est sélectionné pour partir, comment l’accompagnez-vous pour préparer sa mobilité ?
JMR: Il y a deux aspects dans l’accompagnement. D’une part, les aspects logistiques et financiers : voyage de reconnaissance dans le pays avec le conjoint, prime de mobilité, maintien du niveau de vie, égalisation fiscale sous le principe de «no gain, no loss», relocation incluant la recherche d’un logement, la scolarité des enfants, le transfert, le voyage pour rentrer dans le pays d’origine.
Ensuite, nous préparons le salarié et son conjoint aux spécificités du pays dans lequel ils partent : renforcement linguistique, formation d’un à deux jours à l’interculturel, aspects santé et sécurité. Sur ce dernier point, nous impliquons la Direction de la sécurité de l’entreprise : pour certains pays, le logement et le véhicule doivent répondre à des normes bien précises, comme par exemple le blindage du véhicule ou un système de tracking permettant de localiser en temps réel les expatriés.
CG/BK : En évoquant la question de la sécurité, vous venez de rappeler l’importance de réfléchir à ses propres critères de mobilité, notamment géographiques. La mobilité internationale n’est pas que géographique, elle implique aussi une flexibilité psychologique, émotionnelle. Pouvez-vous nous parler des formations interculturelles et en quoi elles sont nécessaires ?
JMR : Nous faisons travailler les futurs expatriés sur trois axes principaux : les mécanismes de la culture, la dédramatisation du choc culturel, les différents cycles de la mobilité et les états émotionnels qui y sont liés. Bien entendu, nous les faisons réagir sur la culture du pays d’accueil et les stéréotypes qu’ils peuvent avoir.
Mais la plus grande partie du travail consiste en une réflexion personnelle sur ses propres cadres de référence, tant culturels que professionnels, sur ses valeurs, sur sa manière d’être et de se comporter... Car on ne peut modifier son comportement que si on est conscient de sa propre manière de fonctionner et des raisons qui sous-tendent nos réactions. Et travailler avec des personnes d’une autre culture nécessite de s’adapter. La question ensuite est de se demander jusqu’à quel point on est prêt à s’adapter : c’est pourquoi certaines personnes sont « expatriables » dans des pays et pas dans d’autres. Nous mettons également en garde nos salariés contre les jugements de valeur qu’ils pourraient avoir face à l’autre culture : ce n’est pas mieux, ce n’est pas moins bien, c’est juste différent. Attention aussi à la position potentiellement arrogante de l’expatrié qui, parce qu’il sera envoyé à l’étranger pour apporter une expérience, des compétences, se sentira en position de force : le meilleur moyen de se mettre à dos l’équipe d’accueil !
Les formations interculturelles ne sont pas des solutions magiques pour réussir son intégration mais elles permettent d’anticiper les difficultés, notamment émotionnelles, auxquelles seront confrontés les futurs expatriés.
CG/BK : Cette notion d’acculturation se retrouve aussi lors de la phase retour, puisqu’on se sent comme un étranger chez soi (cf article). Il semble que cette phase soit difficile à gérer. Qu’en pensez-vous ?
JMR : Le retour d’expatriation est une phase délicate, et c’est normal. D’ailleurs, la notion même de retour est trompeuse, car elle donne l’impression que l’on va revenir à l’endroit que l’on a quitté quelques années auparavant. Or, on a soi-même beaucoup changé, tout comme le contexte dont on s’est temporairement éloigné. On ne peut donc jamais vraiment revenir à la case départ. C’est sur ce malentendu que reposent les difficultés.
C’est la raison pour laquelle je n’aime pas parler de retour mais plutôt de nouveau départ en fin d’expatriation. Les expatriés reviennent certes dans la direction d’EDF qu’ils ont quittée mais surtout avec de nouveaux acquis, si l’expérience de mobilité a été réussie. La difficulté réside à deux niveaux : lors de leur réintégration dans un environnement qu’ils considèrent désormais comme banal car non international par exemple et lors de la valorisation de cette expérience à l’étranger. C’est sur ce dernier point que j’aimerais insister.
On me demande souvent si une expérience de mobilité internationale a un réel impact sur la carrière. Honnêtement, il est difficile de mesurer cet impact sur le plan du développement professionnel et personnel, même s’il est réel et très riche. Ce qui est sûr, en revanche, c’est qu’avoir réussi sa mobilité apporte, aux yeux des managers, une crédibilité quant à la capacité du salarié à effectuer un changement professionnel. En effet, il a osé tenter l’aventure et a su s’adapter à un nouveau contexte : s’il l’a fait une fois, il peut le refaire et c’est cette projection, à partir de l’expérience passée, qui va rassurer le manager sur la capacité du salarié à gérer son changement professionnel.
Certains peuvent être frustrés car ils ne voient pas l’ «utilité» directe de cette expérience à l’international. Or, et c’est quelque chose qu’ils ont tendance à oublier, la mobilité est un moment privilégié pendant lequel on approfondit la connaissance de soi, la compréhension de ses rapports aux autres. Ensuite, une gestion de carrière ne se fait pas au coup par coup et doit s’envisager sur le long terme. Le salarié doit donc réfléchir en termes de dynamique de carrière et c’est ce que cette expérience internationale lui permet : mise en perspective de ce qui a été accompli jusqu’à présent, prise de recul par rapport aux compétences développées, mise en valeur de certains aspects du parcours...
Si on compare le projet professionnel à un jeu de Lego, cette expérience à l’étranger est représentée par une brique d’une couleur et d’une forme différente qui va se clipser sur ce qui a été construit et va bouleverser le reste de la construction.
CG/BK : Nous venons d’évoquer la valorisation des compétences pour le salarié. Existe-t-elle au niveau collectif, au niveau de l’entreprise ?
JMR : Oui, bien sûr. Une entreprise, qui a vocation à se développer à l’international, a tout intérêt à valoriser cette expérience. C’est un capital non négligeable pour le lancement ou le développement de nouveaux projets internationaux.
Chez EDF, nous reconstruisons le réseau des anciens expatriés pour justement pouvoir les solliciter de nouveau au moment d’un projet dans un pays donné. Ces personnes, par leur expertise et leur connaissance du pays, vont ainsi contribuer à l’émergence d’idées, l’apport de conseils et de contacts utiles pour la réussite du projet... A travers la construction de ce réseau, nous réalisons simultanément une cartographie des ressources et des compétences internationales, ce qui permet aussi de revaloriser la personne anciennement expatriée et confirmer la plus-value à moyen et long terme de cette expérience internationale.
CG/BK : Nous arrivons à la fin de notre entretien. Un dernier mot ou conseil avant de nous quitter ?
JMR : Si vous envisagez de partir à l’étranger, posez-vous le plus de questions possible et notez-les. Ne partez pas sans avoir obtenu de réponses ou de conseils : partez en toute connaissance de cause ! Bien préparée, une mobilité internationale est toujours un très beau projet.
CG/BK : Mr Romann, merci beaucoup pour cet entretien et bonne continuation dans vos nouvelles fonctions de DRH chez EDF R&D !
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